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L'histoire en mots.
4 juin 2013

L'atroce vécu d'une jeune juive

 

       Nous étions le 11 septembre 1942. Je ne sais pas comment cela est arrivé. Je sais juste que tout a été trop vite. Il pleuvait ce jour là. J’étais avec ma sœur Polette, à l'école. Je me souviens qu'il faisait très froid. Nous avions fini nos exercices et le maître nous avait autorisé à aller dans le coin lecture. Polette, ma petite sœur avait deux ans de moins que moi, 7 ans. Mais elle était tellement intelligente qu'elle avait déjà sauté une classe et était en CM1. Alors que nous étions en train de lire un livre au fond de la classe, nous avons entendu des cris et des pleurs venir du couloir. C'est alors que le maître s'est mit à crier: « Cachez vous! VITE! » Le maître ferma la porte à clé et moi et mes copains avons essayé de se cacher partout où on le pouvait : Sous les tables, dans les placards, derrière le tableau, sous les éviers... Mais des hommes derrière la porte essayaient de la casser. J'eus simplement le temps de cacher Polette dans le placard du fond et de lui jeter un petit: « Ne bouge pas Polette, je reviens te chercher » que la porte céda et tous les hommes entrèrent et là, tout est allé très vite. Ils obligeaient tout le monde a sortir dehors et menaçaient ceux qui n'obéissaient pas à leurs ordres. Ils cherchaient et trouvaient tous les enfants cachés. Quand l'un d'eux s'approcha du placard où était cachée ma sœur, mon cœur s'arrêta. J'avais peur. Il l'ouvrit... Mais Polette était très fine et je ne l'ai pas vue. Elle avait dû se cacher sous tout le bazar qui se trouvait là dedans. Il regarda bien à l'intérieur mais il ne trouva Polette. J’entendis quelqu'un derrière moi dire « Qu'est-ce que tu fous là ! Dehors j'ai dit » Je me suis retournée et j'ai vite compris que c'est à moi qu'il parlait. Pas remise de mes émotions, j'avais du mal à revenir dans la réalité et je me rendis compte qu'il ne restait plus que moi dans la salle. Et le temps que je me rende compte de tout ça, il s'était approché de moi, j'ai levé les yeux et j'ai juste eu le temps de voir sa grosse main arriver sur mon visage. Et juste avant qu'elle ne me touche il a crié une chose comme « Platzt, schmutzige kleine jüdische ». Sa main s'écrasa sur mon visage et je me cognais contre le bureau à côté de moi. C'est à ce moment là que j'ai perdu connaissance. Quand je me suis réveillée, la première chose que j'ai vue c'est la poussière qui volait autour de moi et le sang qui coulait de mon front, l'homme m'avait ouvert tout le front. Je toussais et peu à peu j’arrivais à entendre de nouveau. Tout autour de moi s'affolait : les gens, les petits, les grands, les vieux. J’entendais des cris, des pleurs et des coups de fusil. Je n'avais pas la force de me lever. Mais d'un coup je repensais à Polette. Où était-elle ? L'avaient t-ils retrouvée? Je me suis levée et là au loin j'ai vu M. Adaoui, mon professeur. Près de lui je trouverai des réponses. Quand il m'aperçut, il courait vers moi et me prit dans ses bras. Je l'aimais tant. Et là je lui demandais le plus important : « Maitre, où est ma sœur ? » Et là, il s'est mit à pleurer. C'était la première fois que je le voyais pleurer. Je pris mes petites mains pour lui essuyer ses larmes. Et il me dit : -Elle était dans l'école n'est-ce pas ? Tu l'as cachée ? Terrorisée je lui répondis que oui ; Et c'est avec douleur qu'il m'expliqua qu'après m'avoir sortie de l'école, il lui avait mis le feu. Ce n'était pas possible. -Mais Polette elle est sortie ? Elle s'est enfuie ! Hein Monsieur ! Dites le moi, elle n’est pas restée dans le placard, elle est partie, elle a senti la fumée, elle s'en est rendu compte, elle est intelligente, elle est est partie, elle... Il me mis sa main sur la bouche. Et la seule chose que j'ai entendue après c'était: Je suis désolé Anny... Et je peux vous promettre qu'à ce moment là, le monde entier s'est arrêté de tourner. Je voyais les lèvres de M ; Adaoui parler, et ses yeux pleurer. Je voyais la pluie tomber à fines gouttes. Je voyais les gens partout autour courir et s'affoler. Je voyais, mais je n'entendais rien. Je ne comprenais rien. Tout était au ralenti. Des larmes coulaient de mes joues mais la pluie les cachait. Et c'est à ce moment que j'ai compris que j'avais tout perdu. Mon monde, mon plus grand espoir, ma plus grande fierté, ma petite sœur. Mes parents étaient violents et je n’éprouvais pas le moindre sentiment pour eux. Ma sœur me donnait chaque jour l'amour qu’eux ne savaient pas me donner. J'avais grandi avec elle et aujourd'hui on me l'arrachait comme si j'avais commis le crime le plus méchant du monde. Je m'évanouis. Quand je me réveillai, j’étais dans le noir total et le bruit autour de moi m'assourdissait. Des femmes criaient, des hommes lançaient des insultes à tout va, des bébés hurlaient. Quelque chose me serrait. Je me débattais quand j’entendis la voix de M ; Adaoui : -Anny c'est moi, ne panique pas ! Apeurée je lui demande : -Mais où on est ? Pourquoi on est serré ? J'en ai marre je veux m'en aller ! Je veux retrouver Polette ! M.Adaoui, Guili de son prénom me répondit : Je ne sais pas, on est dans un train et on va quelque part, n'aies pas peur. Je savais qu'il en savait plus, qu'il savait pourquoi on était là et qui étaient ces hommes violents de tout a l'heure, mais il ne voulut rien me dire. Je n’étais même pas restée éveillée 5minutes que déjà ma tête tournait à cause du manque de place, de la chaleur et du bruit infernal. Je suis retombée dans les pommes. « DEBOUT ! SORTEZ DE LÀ BANDE DE VERMINES ! » C'est ce que j’entendis quand je me réveillai. Je ne savais pas combien de temps on avait passé dans cette boîte noire et depuis combien de temps je n'avais ni bu ni mangé. Bizarrement il y avait beaucoup moins de bruit. D'un coup je vis de la lumière. Ils ouvraient les portes en bois. La lumière nous éblouit. Je ne voyais plus rien. Je me forçais à ouvrir les yeux quand tout d'un coup la porte fut complètement ouverte, des corps tombèrent par terre, sans vie. Un bébé. J'aperçus un bébé, là devant mes yeux, tout bleu, les yeux ouverts. J'aurais préféré ne plus voir du tout. Mon corps entier tremblait et un homme hors du train en bois s'approcha et me dit : -Ca te choque ? Ce n'est rien. Ce n'est qu'un insecte en moins. Tu finiras pareil comme lui. Et là, il fit la pire chose que j'ai vue dans ma vie. Il prit le bébé de quelques mois seulement mort dans ses mains et lui frappa le crâne contre la porte en bois. Son crâne explosa. Et tout son sang s'étala sur moi. Je me mis a crier, c'était affreux, terrifiant, ignoble. Ce fut la pire épreuve que j'ai vécu dans ma vie. Voir la tête d’un nourrisson exploser juste à côté de moi. Ce n'était qu'un cauchemar. On ne pouvait pas faire ça en vrai. Un Homme ne pouvait pas faire ça. Puis il cria : Au boulot. Et là je vis des hommes, des Nazis disait-on, prendre les bébés de leurs mamans et séparer les hommes et les femmes. Je compris vite que je n'avais pas été mis dans le bon wagon puisque j’étais la seule enfant avec quelques nourrissons. J'ai été séparée de Guili. Ca m'a déchiré le cœur. Quand il s'éloigna je lui fis un bisou de la main et à ce moment j'ai prié pour que ce ne soit pas la dernière fois que je le vois. Quand les Nazis séparaient les femmes et les hommes, c'était dur à supporter. Des femmes étaient séparées de leurs maris, et on pouvait lire dans chacun de leurs regards un message d'amour et un adieu difficile à avouer. Moi je reverrai M. Adaoui, c'est une certitude.J'avais été séparée des adultes et mise dans un coin puisque j'étais la seule enfant. Quand je me suis retrouvée seule avec les hommes en uniformes ils m'ont regardée et l'un d'entre eux a dit : -Elle, je la garde pour ce soir, je vais m'amuser. Je n'ai pas compris. Au loin j'aperçus des enfants de mon âge. Ils étaient les un derrière les autres. Je ne savais pas ce qu'ils faisaient. J'ai attendu là, pendant quelques minutes à regarder au loin les enfants et à écouter les conversations des Nazis en allemand. Quand tous les enfants furent partis, l'homme qui voulait me garder m'accompagna au lieu où avaient été les autres enfants. On arriva devant un bureau et l'homme dit : Il te reste un numéro ? Et la dame à qui il s'adressait lui répondit : Il en restera toujours pour ces trucs là, en me regardant ; Elle me prit le bras et avec un appareil me grava un numéro dans la peau. Ca faisait terriblement mal. Ca brulait. A la fin je vis le numéro 413 gravé sur ma peau. Il commençait à faire nuit. L'homme me dit de le suivre. Arrivés dans une chambre avec un lit, et croyant que c'était pour moi, je m’approchai du lit avant d'entendre siffler et dire: Ne t'approche pas. Toi tu dors là. Et il me montra un drap troué et taché de sang par terre. Je le regardai et lui dit méchamment : Je m'appelle Anny Yolande Horowitz. Il rigola et me répondit : Tu n’es personne, tu n'es rien, tu ne vaux rien. Ces mots me firent mal au plus profond de mon cœur. Souvent Polette me disait : Merci pour tout Nyny, tu es tout pour moi ! Et il rajouta : Tu peux dormir. Ce soir je suis fatigué, tu n'aura rien. Mais demain tu prendras cher. J'avais peur. Il me laissa seule dans la chambre et en cherchant dans sa table de nuit j'ai trouvé quelques feuilles et un stylo avec lequel j’écris tout de suite. Le lendemain quand je me réveillai, il n'y avait personne dans le lit mais quelqu'un avait dormi là puisque le lit était défait. Je me levai avec une douleur assommante dans la tête. Et là en regardant par la fenêtre j'aperçu de loin M. Adaoui ! Je le reconnu grâce à son visage si particulier, si joli. Il avait changé de vêtements; Tous les hommes étaient habillés de la même manière. Ils avaient comme un uniforme bleu avec des rayures blanches. Ils travaillaient. Ils devaient travailler. Ils faisaient des trous dans le sol je crois. C'est décidé, j'irai le voir. J’ouvris la fenêtre, et sur le côté il y avait une échelle accrochée au mur. C'était un signe. Je sortis par la fenêtre et descendis le plus vite possible. Il y avait des nazis partout, je devais faire très attention. J'ai donc décidé de passer tout derrière, dans les feuillages et les buissons. Les épines me griffaient le visage. Je saignais. Mais je devais voir Guili. Arrivée à quelques mètres de lui, je l’appelais en chuchotant. Il s'arrêta, regarda autour de lui et je lui fis un petit signe de la main. Il m'aperçut et sur son visage j'ai vu se dessiner un sourire qui voulait tout dire. Il regarda les chefs et dès qu'ils ont eu le dos tourner il me rejoigna dans les buissons. Il me prit dans ses bras et me demanda comment j’allais. Je lui dis la vérité. Lui ne voulait rien me dire sur l'endroit où il avait dû dormir et ses conditions de survie. Mais son visage était déjà très fatigué au bout de 24h seulement après notre arrivée. Je me souvenais de ses mots, ils résonnaient encore dans mes oreilles et dans mon cœur. Pendant mon dernier instant près de lui il m'avait dit qu'il était fier de moi et de mon parcours. Que malgré mon jeune âge il trouvait que j’étais forte et qu'il aurait aimé m'enseigner encore beaucoup de chose car j’étais une élève sérieuse. Il espérait que mon entrée en 6ème allait bien se passer et qu'il penserait a moi. J'ai compris dans ces mots, un adieu auquel je ne m’attendais pas du tout. Je ne répondis rien et le serra dans mes bras. Mais j'ai dû faire bouger les arbustes, et les nazis se mirent à crier et à courir vers nous. Ils nous ont obligés à sortir. Quand je sorti je reconnu l'homme de la chambre et il cria: Mais tu es là petite garce! Je te cherchais partout! Et il m'attrapa par les cheveux. Les autres homme attrapèrent M. Adaoui et le frappèrent à la tête. Il tomba au sol. Un autre le ramassa et le mit a genoux, et ils se mirent tous à le frapper. L'homme qui me tenait me regarda dans les yeux, prit son pistolet et visa la tête de Guili avant de me dire : Regarde le bien petite peste, il n’est personne, il n'est rien, il ne vaux rien comme toi et tous les autres ici. Et il tira. M. Adaoui tomba mort au sol, et comme si ça ne suffisait pas, comme si tuer le détendait, comme si faire du mal au gens était sans conscience, il vida son chargeur sur tout son corps. A cet instant je me suis effondrée. Je criais, et je priais YHWH. Devant mes yeux une mare de sang. Mon professeur, mon préféré. Il m'avait appris tant de chose. J’étais admirative de ce professeur. Il avait le don de savoir nous faire partager tout ce qu'il savait sans jamais nous ennuyer. C'est grâce à lui que j'ai pris confiance en moi. Ca faisait trois ans qu'il était mon professeur et ça faisait trois ans que j’apprenais et étudiais avec passion. Son prénom seul, me rappelait tout ce qu’il était pour moi ; Guili : ma joie . J’étais jeune, et déjà j'avais l'impression d'avoir vécu les épreuves les plus dures de ma vie, mais je crois que ce n'était pas la pire. L’homme de la chambre me regarda, puis me dit : Toi petite peste, chez le docteur Mangele ! Un docteur? Pourquoi un docteur? Je ne suis pas malade. Mais je compris vite ce que le nazi voulait me faire subir, de la torture. Arrivée chez le docteur, l’homme me laissa avec et partit. Le docteur me regardait avec un regard froid, terrifiant. Il faisait très peur. Je ne compris pas ce que qu’il me fit au début ; Il me mit sur une sorte de table et m’attacha les mains et les pieds. Puis il me frappa la tête avec un statut qui se trouvait à côté de la table. Ma tête se mit à tourner, tout autour de moi tournait ; Tout était flou. Et je sentais ses mains sur mon corps qui commençait à me caressé. Je sentais sa bouche et ses mains frôler mon corps. Et là je ne peux pas raconter la suite. Je n’ai pas les mots, pas la force, pas le courage. Imaginez la plus grande torture qu’on puisse imaginer. Ne plus pouvoir contrôlé son corps, ne plus être maitre de son corps ; Je ne pouvais pas me débattre, je ne pouvais rien faire ; je n’avais même pas la force de crier. Je me suis laissée faire, j’ai subit. Je me suis tu. Je suis de retour dans la chambre. C’est le ‘docteur’ qui m'a raccompagnée ; Je me sens mal. J’ai mal partout dans mon corps, dans ma tête, dans mon cœur. Je n’ai plus la force de rien. La fenêtre est ouverte. C’est très haut ; Mais je n’ai pas le courage de sauter ; Pourtant une partie de ma tête me dit que je n’ai pas le choix, qu’il n’y a qu’une entrée ici, et pas de sortie ; Il n’y a pas d’issue de secours. Je vais y aller ; Je dois le faire. Polette, je sais que tu t’es enfuis de l’école, je connais ton grand courage et ta détermination. Je le sais. Et si un jour tu lis ça, sache que j’ai pensé à toi chaque jours, chaque secondes. Qu’il n’y a pas une seule fois où l’image de ton visage n’a pas effleurée mon esprit. Fais attention à toi.

Par Alexia D.

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